10 octobre 2025
La fameuse « bataille de Poitiers » : un de ces jalons historiques dont l’évocation suffit à convoquer l’imaginaire guerrier du Moyen Âge. Mais saviez-vous que l’essentiel des combats menés par Charles Martel contre les troupes de l’émir Abd al-Rahman eut lieu au nord de… Tours, et non à Poitiers ? De nombreux historiens situent l’affrontement vers Moussais-la-Bataille, entre Tours et Poitiers (Wikipedia, livre «», J.Cl. Petit).
Au fil des siècles, cette victoire est devenue un mythe fondateur, dont la mémoire s’infiltre encore dans certains lieux : il n’est pas rare d’entendre, sur les chemins du Vieux Tours, le récit murmuré d’une cité « qui sauva l’Occident ».
Au-delà du cliché de « ville étape », Tours a pendant des siècles incarné un pôle stratégique majeure en France. Lors de la Guerre de Cent Ans, de l’anarchie féodale à la Renaissance, la Loire fut plus qu’un fleuve : elle devint une frontière politique et militaire, mais aussi la clef de la survie du royaume (La Nouvelle République, 2016).
On dit même qu’une rivalité féroce opposa les pâtissiers de Tours et de Blois quant à la fourniture d’entremets aux banquets royaux : les fameuses rillettes et le « nougat de Tours » seraient nés d’une de ces joutes gourmandes.
On connaît souvent le « Grand Schisme d’Occident » (fin XIV – début XV siècle), où Rome et Avignon disputaient la papauté. Ce qu’on ignore plus : l’une des solutions imaginées fut… un concile à Tours. En 1163, le concile de Tours, convoqué par le pape Alexandre III, réunit plus de 400 évêques venus de toute l’Europe pour régler des querelles religieuses qui secouaient jusqu’aux trônes des rois (Mélanges de l'École française de Rome).
L’événement marqua durablement le visage de la ville : l’Hôtel de Ville médiéval fut réquisitionné, les hôtelleries pleines à craquer, et de nombreuses légendes naissent de ces jours d’agitation, comme celle du scribe ayant rédigé 50 chartes en moins de 48 heures – performance inégalée selon les annales du chapitre.
C’est à Tours qu’un des épisodes les plus méconnus du mythe de Jeanne d’Arc s’est joué. Avant d’aller sauver Orléans, Jeanne vint, commandée par Charles VII, faire forger son épée et – bien plus remarquable – se voir confectionner son armure chez un maître armurier tourangeau (source : Jeanne d’Arc et la Loire).
Encore aujourd’hui, un discret médaillon de bronze, caché près de la rue du Grand Marché, rappelle le passage de Jeanne et de ses compagnons. Certains artisans du quartier, amoureux de récits et d’acier, aiment encore raconter que leur atelier descend « en droite ligne » de cette mythique forge.
Impossible d’évoquer l’histoire de France sans s’arrêter sur la Seconde Guerre mondiale… et le rôle discret de Tours. Ici, on ne trouve pas de grande bataille médiatisée, mais bien un quotidien de courage, d’ombre et de ruse (Archives départementales d’Indre-et-Loire).
Plus de 600 Tourangeaux furent arrêtés pour faits de résistance, la plupart anonymes, dont les actes sont aujourd’hui évoqués dans les dédales silencieux du quartier Blanqui. Les plaques commémoratives, parfois discrètes, sont autant de balises à redécouvrir.
Ce qui rend Tours si fascinante, c’est la manière dont l’histoire se conjugue au présent. Chaque coin de rue, chaque pierre rénovée, chaque détour de Loire porte le souvenir de ces événements, petits ou grands, parfois graves, parfois souriants. Pour celles et ceux qui se passionnent pour le passé ou cherchent simplement à voir la ville autrement, ces anecdotes tissent un récit inattendu, façon mosaïque.
Arpenter Tours, c’est marcher sur les pas de rois en exil, de farouches résistants, de religieux astucieux ou de héros ordinaires. Et demain, qui sait ? Une nouvelle page pourrait encore s’écrire dans l’ombre rafraîchissante d’un cloître, ou dans le brouhaha lumineux d’une terrasse sur la place Plum’. Alors, prêt à découvrir la ville autrement ?