Les secrets de Jeanne d’Arc à Tours : anecdotes et lieux emblématiques à découvrir

La venue de Jeanne d’Arc à Tours : quand la ville devient le théâtre de l’Histoire

Peu de grandes histoires nationales s’incarnent aussi intensément à Tours que celle de Jeanne d’Arc. Printemps 1429 : alors que la France chancelle sous la pression anglaise, une jeune héroïne traverse la vallée de la Loire, bousculant les routines d’une ville d’ordinaire paisible.

Pourquoi Tours ? À l’époque, la cité vivait dans l’ombre d’Orléans et de Chinon, mais détenait un savoir-faire reconnu et, surtout, elle représentait un tremplin stratégique sur la route des batailles décisives de la Guerre de Cent Ans.

Le grand retour de l’espoir : l’armure commandée à Tours

L’un des épisodes les plus célèbres – et les plus fascinants ! – du séjour de Jeanne à Tours concerne la célèbre armure qu’elle y fit forger. Ce n’est pas un détail : l’équipement de Jeanne d’Arc fut commandé dans l’atelier de Maître Février, armurier établi dans la ville, alors haut lieu de la production métallurgique et militaire.

  • Une commande expresse : En avril 1429, Jeanne n’a qu’une semaine pour s’équiper. Selon les Procès de Jeanne d’Arc, elle y fit réaliser une armure blanche, composée de plates, particulièrement rare pour l’époque, et adaptée à sa stature atypique pour une jeune femme du XVe siècle (1m57 d’après les estimations des historiens, cf. jeannedarc.info).
  • La facture… salée : L’armure aurait coûté environ 100 livres tournois, soit l’équivalent de plusieurs années de salaire d’un artisan qualifié. Une fortune allouée par la Couronne, preuve du pari immense que la France faisait sur la « Pucelle ».
  • Une armure fameuse : On ignore ce qu’elle est devenue après sa capture – probablement fondue ou récupérée. Mais selon la tradition orale, certains membres des confréries médiévales de Tours auraient conservé un fragment de cuirasse jusqu’au début du XVIe siècle (source : Archives départementales d’Indre-et-Loire, fonds anciens).

Coulisses et rencontres : les alliés insolites de Jeanne à Tours

L’escale de Jeanne ne fut pas seulement une étape logistique. C’est à Tours qu’elle rencontre Jean de Metz et Bertrand de Poulengy, deux gentilshommes qui deviendront ses fidèles compagnons, bien loin de la rectitude compassée de la cour de Charles VII.

  1. Les merceries de la Rue Colbert : Les chroniques indiquent que c’est dans de petites enseignes, toujours animées aujourd’hui rue Colbert, que l’on aurait brodé et décoré l’étendard de Jeanne. Un certain frère Pasquerel, chapelain de Jeanne, supervisa la conception de la fameuse bannière blanche frappée de la fleur de lys et de l’ange Gabriel (jeannedarc.info).
  2. Un soutien discret mais décisif : Nicolette, couturière tourangelle, aurait accompli des travaux en toute discrétion pour la Pucelle. Elle apparaît dans des comptes royaux de l’époque ; ce sont souvent les femmes de l'ombre qui ont habillé l’Histoire.

Un sacré bain de foule : l’accueil de la population tourangelle

Quand Jeanne arrive à Tours, la ville bruisse de rumeurs et d’enthousiasme. D’après le journal de la bourgeoisie de Tours (source : Chronique tourangelle de 1429), elle fut accueillie en « délivrance » par de nombreux habitants ravis de voir en elle la chance d’une France libre. On raconte qu’un cortège improvisé escorta la jeune femme jusqu’à l’abbatiale de Saint-Martin, l’un des rares monuments tourangeaux à résister au temps.

  • Des marchés en effervescence : La venue de Jeanne aurait quadruplé la fréquentation du marché du Grand-Carroi cette semaine-là, perturbant jusqu’au trafic fluvial sur la Loire.
  • Un repas populaire : Jeanne, selon la tradition orale, aurait partagé une soupe de fèves avec les compagnons d’armes et quelques domestiques dans une taverne du quartier Saint-Julien. Plusieurs établissements revendiquent encore aujourd’hui cette anecdote, dont l’auberge de la rue du Change.

Étendards et spiritualité : Tours, étape clé dans la foi de la Pucelle

On néglige souvent le rôle spirituel de Tours dans le voyage de Jeanne d’Arc. Or, la ville demeurait à l’époque un grand centre de pèlerinage, en raison du tombeau de saint Martin, le plus populaire des saints gaulois.

  • Prière à Saint Martin : D’après plusieurs témoignages, Jeanne serait venue prier devant le sanctuaire de Saint-Martin afin d’obtenir sa protection avant d’entrer en campagne contre les Anglais (ville-tours.fr).
  • L’influence de la Basilique : La basilique aurait vu passer de nombreux soldats et compagnons de Jeanne, désireux de s’attirer la chance et le courage de la sainte.

Les lieux de mémoire liés à Jeanne d’Arc : balade au fil de Tours

Le passage de Jeanne d'Arc a profondément marqué la mémoire urbaine – même si, faute de vestiges monumentaux, c’est aujourd’hui le flâneur attentif qui débusquera les empreintes discrètes de son épopée.

  • La tour Charlemagne : Rattachée à l’ancienne collégiale, elle aurait servi d’observatoire lors du séjour de Jeanne.
  • Le square Jeanne d’Arc : Inauguré en 1929 (500e anniversaire de la libération d'Orléans), ce modeste espace vert rappelle le destin exceptionnel de la Pucelle.
  • La rue Jeanne d’Arc : Percée au XIXe siècle, cette voie relie symboliquement la rive de la Loire aux quartiers historiques, preuve que la mémoire de Jeanne irrigue encore la ville.
  • Plaques et statues : À l'intérieur de la basilique Saint-Martin et sur la façade de l’hôtel Gouin, les plaques commémorant le passage de Jeanne – discrètes, mais éloquentes.

Pour une découverte plus insolite, laissez-vous guider par le circuit “Tours Jeanne d’Arc”, organisé chaque printemps par des passionnés du patrimoine local (programme disponible sur le site de l'Office de tourisme de Tours).

Petites histoires, grandes répercussions : Jeanne d’Arc, une héroïne toujours présente

À travers ces anecdotes, c’est une figure moins lointaine et plus humaine qui se dessine : celle d’une adolescente devenue stratège, soutenue par la ferveur d’une petite ville ligérienne et la chaleur de ses artisans. Plus de 590 ans après son séjour, la Pucelle continue d’inspirer l’éducation populaire : chaque année, près de 5000 écoliers tourangeaux participent à des ateliers historiques sur Jeanne d’Arc, organisés par les musées et associations locales (source : Ville de Tours).

L’aventure de Jeanne d’Arc à Tours raconte tout autant l’ingéniosité artisanale, la solidarité quotidienne et la vie des rues que les grandes charges chevaleresques. En suivant ses traces, on découvre un autre visage de la ville : celui de la résistance, de l’innovation et de l’émotion partagée, qui continue, de siècle en siècle, de réveiller l’imaginaire.